Description
Distribution
Malgré leur présence en Europe au Miocène (
Bromelia du gisement fossile d'Oningen), les Bromeliaceae se rencontrent actuellement surtout dans les régions tropicales des Amériques, bien que quelques espèces se trouvent aussi dans les régions tempérées chaudes (sud des Etats-Unis, Argentine) ou dans les Andes. Seul, le genre
Pitcairnia présente une aire géographique disjointe avec une seule espèce (
P. felicinia) en Afrique de l'ouest, au mont Gangan du Ghana.
En Amérique tropicale, les rosettes des Bromeliaceae, posées sur le sol ou en épiphytes sur les arbres, se rencontrent aussi bien dans les forêts sèches côtières que dans la forêt humide amazonienne, où elles sont mêlées aux orchidées et aux fougères, et que dans les régions sèches de la caatinga et des cerrados où elles forment, en particulier dans le nord-est du Brésil, des associations très remarquables à épineux et succulents avec les
Cactaceae, les
Euphorbiaceae et les
Portulacaceae.
Appareil végétatif
Il s'agit d'une famille de plantes herbacées vivaces, adaptée dans son ensemble aux conditions xérophytiques, avec de nombreux genres totalement ou partiellement épiphytes ou lithophytes. Chez ces genres, les racines servent essentiellement de fixation au support. Le port est parfois arbustif : Deuterocohnia, Puya, ce dernier étant andin et ressemblant aux espèces géantes de Lobelia des montagnes d?Afrique tropicale. Quelques espèces sont stolonifères.
Les tiges sont absentes ou courtes, avec des rosettes basales de feuilles engainantes, simples, rigides, souvent épineuses, dont la base est fréquemment colorée. Elles sont épineuses (Dyckia, Hechtia) ou inermes, glabres ou farineuses (Bilbergia), recouvertes partiellement ou en totalité d?écailles (Tillandsia).
Les membres les moins spécialisés de la famille (Pitcairnia, Puya) sont des plantes terrestres au système racinaire bien développé. Les bases des feuilles sont resserrées, et les feuilles sont poilues afin de limiter la transpiration. Certaines possèdent quelques vraies racines (Ananas), mais leurs feuilles imbriquées à la base servent de réservoir pour l'eau et l'humus utilisé par des racines adventives poussant entra les bases foliaires.
La majorité des genres ont des feuilles-réservoirs encore plus larges à la base, et l'absorption se fait principalement par des poils spécialisés, les trichomes, des feuilles réservoirs, et non par les racines. Les réservoirs peuvent contenir jusqu'à 5 litres d'eau, et forment des "marécages suspendus" (Chodat), abritant une flore (Utricularia, algues de type diatomées) et une faune (grenouilles arboricoles, divers insectes).
Les genres les plus spécialisés (Tillandsia) sont exclusivement epiphytes, ont des racines seulement à l'état juvénile, n'ont pas de feuilles réservoirs, et absorbent l'humidité de l'atmosphère par osmose au moyen de trichomes écailleux multicellulaires. Les écailles s'affaissent par temps sec, permettant des échanges gazeux à travers les stomates, mais réduisant la perte d'eau à la surface de la plante.
Anatomie
Les Bromeliaceae possèdent de l'oxalate de calcium en raphides, rarement en prisme, et des canaux et poches lysigènes à gommes.
Elles ne contiennent pas d'alcaloïdes, mais elles accumulent des enzymes protéolytiques proches de la papaïne dans l'un ou l'autre de leurs organes ou tissus. Elles produisent parfois des stéroïdes (saponines ) et renferment dans tous leurs organes des mucilages, ainsi que des corpuscules siliceux caractéristiques, petits, ronds, plus ou moins inclus dans l'épaisse paroi interne des cellules épidermiques.
Chez Ananas comosus, les feuilles, rigides et coriaces, ont des épidermes cutinisés, épais ; les parenchymes sous-jacents renferment, surtout à la face inférieure, des îlots de fibres assurant la rigidité. La face inférieure porte des stomates communiquant avec un tissu aérifère, alors que la face supérieure est couverte, dans sa partie basale non chlorophyllienne, par des écailles spéciales, en relation avec un tissu gorgé d'eau (parenchyme aquifère). Enfin les faisceaux libéro-ligneux sont entourés d'une gaine de tissus fibreux et sclérenchymateux.
Reproduction
Les fleurs, rarement isolées comme chez les Tillandsia, constituent des épis (Vriesea), des racèmes plus ou moins ramifiés (Aechmea) ou des capitules (Pitcairnia). Ces inflorescences peuvent être subsessiles, mais, souvent, elles sont longuement pédonculées et munies de bractées frequemment colorées. Beaucoup de Bromeliaceae meurent après la floraison, mais produisent des rejets facilitant leur propagation.
Les fleurs sont bisexuées, rarement fonctionellement unisexuées (Hechtia, Cottendorfia, certaines Catopsis), actinomorphes, quelques fois zygomorphes (Pitcairnia, et situées à l'aisselle de bractées souvent très colorées.
Le périanthe se compose de 3 sépales convolutés ou imbriqués, libres ou connés, dont un est parfois fortement réduit, et de 3 pétales libres ou connés, portant occasionellement des glandes nectarifères. Il y a 6 étamines disposées en 2 verticilles et souvent attachées à la base du périanthe. Les anthères versatiles et très mobiles sont caractéristiques de la famille. Leur dehiscence est longitudinale, exceptionellement poricide (Navia. L'ovaire, supère ou infère, possède 3 carpelles soudés, et est triloculaire, chaque loge renfermant de nombreux ovules anatropes sur des placentas axiles. Le style est fin, avec 3 stigmates dressés étalés à spiralés condupliqués.
Chez la plupart des genres, les inflorescences voyantes et les nectaires sur les septums des ovaires sont des adaptations à une pollinisation par les insectes ou les oiseaux, plus rarement par les mamiferes. Les fleurs sont protandres, favorisant ainsi la pollinisation croisée. Quelques genres comme Navia semblent être pollinisés par le vent.
Si l'ovaire est infère, le fruit évolue en une baie (Aechmea, Bilbergia, Nidularium, Bromelia), si il est semi-infère (Acantostachys, Pitcairnia) ou supère, il donne une capsule septicide (Tillandsia, Hechtia, Dyckia, Vriesea). Chez Ananas et le genre proche Pseudoananas, les fruits individuels se soudent et l'inflorescence grossit en formant un fruit multiple. Les graines contiennent un petit embryon et un albumen farineux. Chez plusieurs genres, les graines sont ailées ou portent des appendices caudés ou plumeux afin de faciliter leur dispersion.
Classification et phylogénie
La famille des Bromeliaceae n'est reliée à aucune autre famille de Liliopsides, mais présente quelques affinités avec les
Commelinaceae et les
Zingiberaceae.
Les classifications d'Hutchinson (1959) et d'Engler-Melchior (1964) les apparentent aux Commelinaceae à albumen farineux et embryon externe. Le second auteur les incorpore à l?ordre des Farinosae que, seuls, la nature de l'albumen et le périanthe différencié distinguent des
Liliales. Cependant, Wettstein (1935) place les Bromeliaceae dans les Liliiflores et, comme Bentham-Hooker (1883), les rapproche des
Dioscoreaceae et des
Amaryllidaceae. Les ovules nombreux et anatropes justifient ce rapprochement, tout en les éloignant des Commelinaceae.
Enfin, pour Emberger (1960), les Bromeliaceae constituent un ordre du grand phylum des Liliiflores. Cet ordre y présente des affinités avec les
Commelinales-
Poales (structure des graines, embryon marginal) et les
Juncales-
Cyperales (présence d'huile dans les stomates). Notons qu'Engler inclut dans son sous-ordre des Bromeliineae des plantes placées dans les Juncales d?Emberger et que Wettstein les rapproche aussi des
Juncaceae-
Flagellariaceae. Les Bromeliaceae, par leur parenté incontestée avec les Commelinaceae (dans les Farinosae d'Engler) d'une part, avec les Juncaceae (dans les Liliiflores d'Engler) d?autre part, formeraient alors un lien entre ces deux ensembles.
Les Bromeliaceae sont classiquement divisées en trois sous-familles. L'inflorescence et surtout la position de l'ovaire, utilisée en systématique, sont les seuls caractères variables.
Les
Pitcairnioideae comprennent le tiers des espèces, avec principalement des xérophytes terrestres. L'ovaire est supère, le fruit est une capsule et les graines sont ailées ou caudées :
Pitcairnia, Puya, Dyckia...
Les
Bromelioideae comprennent des genres aussi bien terrestres qu?epiphytes. L'ovaire est infère, le fruit est une baie et les graines n'ont ni d'ailes, ni d'appendices :
Bromelia, Ananas, Pseudoananas, Billbergia, Aechmea...
Les
Tillandsioideae comprennent entre 6 et 12 genres tous epiphytes. L'ovaire est supère, le fruit est une capsule et les graines ont des appendices plumeux formés par la séparation du tégument externe allongé et d?une partie du funicule :
Tillandsia, Vriesea...
Intérets
L'ananas (Ananas comosus) est un fruit comestible important dans les régions tropicales et subtropicales, mais sa consommation est répandue un peu partout dans le monde. Les tiges et les fruits des ananas sont une source commercialisable possible de bromelaïne, une enzyme protéolytique. Les nombreuses espèces d'Ananas ont donné naissance à de multiples variétés, cultivées dans tous les pays tropicaux. Elles sont autostériles et produisent des fruits parthénocarpiques ; mais l'obtention de graines est toutefois facile par simple pollinisation croisée entre espèces ou variétés. La reproduction se fait surtout par voie végétative à partir de rejets à la base du fruit (oeilletons) et des tiges (drageons, cayeux) ou à partir de la couronne. Celle-ci se développe après la floraison et résulte d'une reprise d'activité du méristème apical.
Différentes espèces fournissent des fibres utilisées localement pour la fabrication de vêtements ou de cordages, notamment l'ananas aux Philippines, en Colombie et Neoglaziovia variegata au Brésil. Les fibres de feuilles d?ananas ont également été utilisées de façon expérimentale pour la fabrication de papier. Les filles de l'air (Tillandsia usneoides) sont utilisées pour le rembourrage en tapisserie.
Différents genres sont cultivés comme plantes ornementales, pour leur feuillage comme l'ananas, Billbergia, Crypanthus et Guzmania ou pour leurs rosettes denses comme Dyckia, Nidularium et Aregelia. Des genres comme Pitcairnia, Billbergia, Achmea et Vriesea ont des inflorescences très colorées. Bromelia et Neoregelia sont également cultivés.
En régions sèches, l'eau contenue dans les feuilles réservoirs de certaines Bromeliaceae locales, est un lieu de reproduction pour les anophèles, des moustiques responsables de la transmission du paludisme.
Données éditées le 24 juin 2007